• Didactique du français langue seconde

  • Volet dépôt d'objets d'apprentissage

  • France Boutin, Ph.D.
  • Université du Québec à Montréal
www.didfl2.uqam.ca/depot -> Liste des incidents -> Édition d'un incident

La gestion de la classe

  • Les règles de conduite, la discipline / les récompenses
  • Les tours de parole
  • L'utilisation de la L1
  • Les devoirs
  • L'absentéisme
  • La communication enseignant-apprenants
  • La communication avec les parents
  • Les TIC : les problèmes techniques, le plagiat, les droits d'auteur (le syndrome du copier-coller)

Savoir garder le contrôle de soi

 

  • Les informations générales
  • La catégorie de l'incident
  • La gestion de la classe
  • Le nom donné à l'incident
  • Savoir garder le contrôle de soi
  • Le contexte
  • Le contexte social
  • Les étudiants sont des immigrants adultes nouvellement arrivés au Québec. Ils habitent dans la région de Laval, souvent en milieux plutôt défavorisés. La plupart connaissent une période d'adaptation difficile à leur nouvelle vie au Québec et sont en situation de choc culturel. Ils reçoivent une aide financière du gouvernement pour assister aux cours.
  • Le contexte scolaire
  • Je travaille comme monitrice de français dans un Collège francophone de Laval en francisation. Les étudiants sont de nouveaux arrivants n'ayant aucune connaissance ou une légère base de français. Ils ont besoin d'apprendre la langue pour être en mesure de fonctionner au Québec.
  • Le programme
  • Français de base
  • Le niveau d'enseignement
  • Secondaire IV, V
  • Le groupe classe
  • Il s'agit d'un groupe de 19 étudiants adultes de nationalités variées, mais majoritairement colombienne. Dans leur pays d'origine, la plupart n'étaient pas étudiants, donc c'est un défi pour eux de revenir sur les bancs d'école, surtout pour apprendre une langue étrangère. Ils sont débutants en français et ne semblent pas très motivés à cause de leur situation sociale difficile.
  • La situation ou la circonstance entourant l'incident
  • Pour ce groupe, je travaillais conjointement avec une professeure peu organisée et très permissive avec les étudiants. J'étais avec ce groupe deux heures par jour, tous les jours et la professeure faisait les quatre heures restantes. Mon travail consiste à faire des activités de renforcement avec les étudiants afin de pratiquer les notions enseignées par la professeure. Cette professeure ne respectait pas les règlements du Collège concernant les absences et les retards des étudiants et ne semblait pas prendre son travail très au sérieux. En effet, elle prenait de longues pauses pour fumer et jaser avec certains étudiants. De plus, elle changeait souvent sa planification à la dernière minute sans m'avertir, ce qui fait que j'arrivais souvent en classe avec des activités dont le contenu ne convenait plus aux leçons enseignées. Il m'était très difficile d'imposer un minimum de ponctualité et de me faire respecter des étudiants. J'étais en début de carrière et je manquais quelque peu d'assurance, ainsi j'hésitais à intervenir pour demander le silence. Je voulais me faire accepter et "aimer" des étudiants, alors je fermais les yeux sur certains comportements dérangeants, notamment le bavardage dans la langue maternelle. Je sortais souvent frustrée de ce cours et je souhaitais que les choses changent. Je voulais trouver un moyen de me faire respecter et de leur faire comprendre l'importance de la pratique dans le cours.
  • La réflexion avant l'action
  • La réflexion
  • Comme je n'intervenais pas systématiquement auprès des étudiants lorsqu'ils faisaient des écarts de conduite, ils me "testaient", c'est-à-dire qu'ils prenaient de plus en plus de libertés en classe pour voir jusqu'où ils pouvaient aller avant que je ne réagisse. J'étais confuse, car pour moi, comme il s'agissait d'adultes, je ne comprenais pas pourquoi ils ne se disciplinaient pas seuls. Pourquoi ne voulaient-ils pas participer à mes activités? Elles fonctionnaient pourtant très bien avec d'autres groupes... Ce jour-là, j'étais bien décidée à leur montrer que je pouvais contrôler une classe. J'étais à bout de nerfs et mon niveau de frustration était considérablement élevé. Si la situation se présentait, je voulais faire une intervention efficace auprès de l'étudiant afin que le groupe me prenne au sérieux.
  • L'action
  • La description de l'action
  • Alors que nous corrigions un exercice sur les verbes pronominaux, un étudiant a changé de place (lorsque j'avais le dos tourné). Il est allé s'asseoir complètement à l'arrière, à côté d'une autre étudiante de même nationalité et s'est mis à parler avec elle dans sa langue maternelle. J'étais outrée, mais comme je voulais garder mon sang froid, je lui ai demandé calmement de retourner à sa place et de lire le prochain numéro de l'exercice. Il s'est levé extrêmement lentement et s'est assis à une autre place, seul, en baillant très fort. J'ai pensé: "Alors, là, c'est trop!". J'ai pris ses livres et son crayon et les ai lancés sur son bureau. Il n'a pas réagit. J'ai ouvert son cahier très bruyamment et lui ai dit: "Allez, lis. Numéro 3!" Comme il ne faisait rien, j'ai presque crié qu'il devrait vraiment prendre ce cours au sérieux, comme il avait plus de difficultés que les autres. J'ai ajouté qu'il avait besoin de parler le français pour vivre et pour travailler ici. J'ai terminé en disant que j'étais très fâchée et que son comportement était inacceptable. Tous les autres étudiants étaient figés et j'ai bien sûr été incapable de terminer la correction de l'exercice. J'étais si en colère que je tremblais, j'avais totalement perdu le contrôle, non seulement de moi-même, mais aussi de la classe.
  • Le résultat
  • Inefficace
  • La réflexion après l'action
  • L'explication du sens de l'incident
  • Cet incident est signifiant, car c'était la première (et unique) fois que je perdais le contrôle de moi-même. Après l'incident, j'étais dévastée. Ma confiance en moi était au niveau le plus bas et je ne pensais jamais être capable de retourner en classe avec ce groupe, surtout qu'il s'était plaint de cet épisode à la professeure. J'ai compris par la suite que j'aurais dû discuter avec la professeure des problèmes que j'éprouvais avec ce groupe et en quoi son attitude rendait mon travail difficile. Nous aurions pu trouver des solutions pour rendre le travail de chacune plaisant et efficace. Je me suis aussi rendu compte que je n'aurais pas dû laisser monter l'agressivité en moi. En effet, lorsque j'ignorais certains comportements déplacés, la colère montait en moi et ce jour-là, j'ai éclaté. J'ai développé par la suite une attitude plus constante concernant la discipline. Avec l'aide de collègues comptant plusieurs années d'expérience, j'ai appris à m'imposer physiquement en classe (gérer l'espace) et à fonctionner selon un système d'avertissement systématique. Ainsi, je réagis maintenant automatiquement lors des écarts de conduite et je ne laisse pas l'agressivité prendre le dessus. Me mettre dans un tel état de colère devant la classe n'était certes pas une bonne idée pour gagner la confiance des étudiants. Ils ont réussi à avoir le dessus sur moi et je ne leur ai montré que mes faiblesses. Le lendemain de l'incident, je suis allée m'excuser auprès des étudiants en compagnie de la professeure. Ce fut une chose très pénible à faire, mais nécessaire. Les cours suivants, j'ai demandé aux étudiants ce qui les motiverait, ce qu'ils aimeraient faire pendant leurs périodes avec moi afin d'enrichir leur français. Certaines de leurs suggestions étaient excellentes et j'ai adapté mes activités à leurs besoins. J'ai compris qu'ils préféraient faire des activités ludiques à l'oral et des jeux de rôles pour que ce soit signifiant pour eux. Ils faisaient assez d'écrit avec la professeure, ils voulaient pratiquer l'oral pour être capable de fonctionner lors de situations quotidiennes, par exemple au supermarché ou à la banque. Nous avons finalement terminé la session en beauté, l'ambiance dans la classe était bien agréable.
  • Les acquis ou la construction du savoir enseigner
  • Les acquis
  • J'ai appris que je devais adapter mes cours aux besoins des étudiants et que je devais gérer l'espace de la salle de classe et fonctionner selon un système d'intervention systématique. Il est important de réagir sur le champ et de ne pas laisser monter l'agressivité en soi. J'ai aussi appris qu'il est primordial d'avoir une bonne commnunication avec ses collègues, surtout lorsqu'on partage un même groupe. Un bon travail d'équipe entre collègues inspire la confiance aux étudiants et favorise une bonne organisation. Ainsi, étudiants, profeseurs et monitrices sont gagnants! Cet incident a contribué à mon développement professionnel et personnel, car j'ai maintenant beaucoup plus confiance en moi et je connais mes limites.
  • Le dépôt
  • Incident
  • Incident déposé
  • Retour à la liste des incidents